mercredi 30 juin 2010

lundi 21 juin 2010

La vocation des Mumubips


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mercredi 16 juin 2010

Jardinage

Un jour béni pour le jardinage aujourd'hui. Très tôt ce matin, je suis allée voir la butte, qui fait environ trois mètres carré. Chaque année vers le printemps, le laurier perd ses feuilles, qui commencent par se racornir avant de tomber ; il reverdit en juin avec de nouvelles pousses autour des branches qui semblent mortes. Ainsi, à sept ans déjà, il a toujours l'air de renaître. Drôle d'attitude pour un laurier. Les giroflées que j'avais semées en jardinière puis repiquées en automne ont fleuri sur la butte à peine l'hiver terminé. C'était ravissant. Maintenant elles ont donné des gousses, on dirait de jeunes haricots verts. Elles ne demandent qu'à revenir. Leur parfum est proche du clou de girofle, en plus discret. Au tour des capucines, entrées en scène avec leurs feuilles rondes qui vont très vite s'élargir ; ensuite elles donneront leurs petites clochettes multicolores, puis en automne leurs grosses graines, inratables pour les myopes éventuels ou aveugles. La butte je pourrais en parler pendant de longues minutes, comment je l'ai créée par exemple ; juste à l'emplacement où je rangeais un vieux vélo sous une bâche. Des couches de feuilles mortes, d'herbe de tonte, de vieux terreaux provenant de dépotages successifs de quelques aromatiques, de déchets de végétaux divers ont fini par donner un bon compost ; les vers de terre aidant, j'ai obtenu une terre de bonne qualité si j'en crois la mine du rosier. Celui-là donne des roses blanches assez fragiles mais somptueuses ; l'arbuste qui les porte montre des épines très robustes, dardés vers le haut, prêtes pour le service, si bien que je me demande comment les ânes s'y prendraient pour manger un tel rosier. Je pourrais vous en parler encore et encore, mais je dois justement y retouner afin de repiquer un fraisier, car cette fameuse butte en a déjà accueilli deux qui s'y épanouissent à merveille, ainsi qu'un cassis, un framboisier qui fait plein de petits et un groseillier. Tout cela sur trois mètres carré. Stimulant ce petit carré de terre. Bonne journée à vous.

samedi 12 juin 2010

Une photo de Bray-dunes


Bray-dunes se trouve à côté de Dunkerque, (pour les visiteurs du blog qui ne sont pas de la région et qui auraient de grandes lacunes en Histoire). J'ai pris cette photo ce printemps, avant de gagner à pieds, par la plage, La Panne, ville balnéaire flamande. L'ambiance des deux villes ( Bray-dunes et La Panne) distantes de cinq six kilomètres en ligne droite (peut-être plus ou moins, je ne sais pas trop évaluer ce genre de distance)n'est pas la même. Ce sont des mondes différents. En tant que français nous sommes toujours très bien accueillis par les tenanciers (flamands) du café situé en centre ville où nous prenons habituellement une collation. Nous y voyons francophones et flamands très bien communiquer ensemble, rire ensemble, c'est pourquoi l'éventuel divorce entre wallons et flamands, de plus en plus plausible d'après les médias, m'étonne un peu.

vendredi 11 juin 2010

Souvenirs

Je vous disais sur mon blog Découvertes qu'en novembre 2009, par un jour d'alerte météo orange, je m'étais baladée à Loos-lez-Lille. Une bonne journée en vérité, même si le soleil n'était pas au rendez-vous, il y avait du bonheur dans l'air. Il ne faut pas se fier aux apparences du paysage, "sous les nuages la lumière". Ma voiture était garée à quelques mètres de ce charmant café encore fermé à cette heure matinale, le jour vient à peine de se "lever" :


Comme je ne connais pas du tout les lieux, je prends mes repères, notamment ce chantier devant lequel je passe pour me rendre au canal."La grue" nous offre une jolie perpendiculaire, sur fond cubique. Rien de funèbre sur ce chantier, je ne sais pas à quoi cela tient :


Je ne m'attarde pas devant ce joli foutoir (je parle du chantier)et entame mon périple. Me voilà aux abords d'un mini tunnel. Avant de passer sous le tablier de cette passerelle j'enregistre ce précieux faisceau de lumière :


Quel circuit ! Surtout ne pas passer à côté de cette rangée de maisons d'allure austère, je l'imprime donc via mon appareil photo. C'est tout Lille et ses environs ce genre d'alignement de grandes maisons :


Une fois arrivée au canal, je flashe la péniche Maro (elle est sur Découvertes) et m'intéresse à la remorqueuse que je vois arriver de loin. La seule à naviguer à cette heure sur ce canal par un samedi :


Elle s'approche :


Là voilà tout près :


Elle passe très vite, comme le temps depuis ce moi(s) de novembre 2009. Je trouve ce paysage tout empreint de mélancolie assez poignant :


Le ciel change lui aussi, d'un moment à l'autre :

L'Asinerie des petites fleurs



mercredi 9 juin 2010

Nils-Aslak Valkeapää

"Nils-Aslak Valkeapää, né en 1943, poète lapon d'expression same dont les joïks (poèmes-chants) transposent avec bonheur l'oralité ancestrale. Variations multiples sur les thèmes de la vie, de la nature, de l'amitié, de l'amour, de la solidarité entre opprimés. Le nomadisme et l'attachement à la Laponie éternelle occupent cependant une place privilégiée dans le cœur du poète same." ( de la Revue littéraire Europe juin juillet 1985)

Il grandit seul
Il aimait les oiseaux
il jubilait aux premières trouées de neige
Il apprit à rester seul
à jouer en solitaire
des jeux qui étaient vrais
Immobile il suivait des heures durant
la navette des truites
Le temps lui était étranger
chaque jour son propre étalon
à nul autre comparable
Il apprit à imiter les oiseaux
à glapir avec la buse et le pluvier doré
pour lui rien d'insolite
il s'en trouvait pourtant des bonnes gens
pour colporter
qu'il était étrange

***
Immobile je regarde
les montagnes s'enfoncer dans la brume

Tu es partie

Peut-être devrais-je pleurer
mais je reste immobile
et je sens
les pensées cheminer dans ma tête
des jours passent
d'autres vont venir
et puis il y a aujourd'hui

Immobile
les yeux secs je vois
l'automne recouvrir la vie d'un voile de brume

***
ainsi s'écoulent les jours
ainsi s'en vont les semaines
ainsi s'enfuient les années

ainsi fondent les neiges pleuvent les pluies
ainsi s'épuisent les croyances et se brouillent les rêves

maintenant je réchauffe sur mon sein
cet oiselet transi
qui gazouille encore et joïke

maintenant j'entends dans mon cœur
la solitude du vent qui hurle
et du fond de l'obscure nuit polaire
les camps d'hiver qui geignent

déjà s'affaiblit le chant du joïk
déjà s'amenuisent ceux qui le chantaient

maintenant c'est au vent de balayer
la toundra de mon cœur
d'en chasser les frimas

Traduit du same par Jocelyne Fernandez

mardi 1 juin 2010

Eino Säisä

Eino Säisä, né en 1935, romancier d'expression finnoise au souffle remarquablement soutenu et puisssant. On lui doit la longue suite de romans réunis sous le titre Les Terres de gel refleurissent (1971-1979) où l'on voit naître la Finlande moderne.

L'hiver sur l'île

"Le gel va en s'accentuant, la glace se solidifie. Sur les bords du lac, du côté de la grange, subsistait encore ce matin, une nappe d'eau. Elle s'est prise peu à peu, elle aussi, au cours de la journée. Le soleil brillait, la veille au soir ; il est tombé juste assez de neige pour couvrir la glace d'un duvet et maintenant le lac s'étend, tout blanc dans son immensité sillonné de craquelures. Le toit du sauna se détache, d'une netteté parfaite, la cour et les sentiers éblouissent par leur blancheur.
Je fais du feu. Il fait bon à l'intérieur, je vaque à la tambouille. Bien avant la tombée de la nuit, je remplis la lampe de pétrole — je prépare tout pour ce soir et pour demain matin, j'apporte une quantité suffisante de bois. Je jette de fréquents coups d'œil au-dehors, je ne me décide pas à m'asseoir. Je mange debout.
La glace a travaillé toute la semaine. Pépi, le chien, en a eu des accès de terreur. Dans la journée, il s'est enfui de l'île sur la terre ferme et bien que je l'aie sifflé, appelé, il est resté de l'autre côté, ne cessant d'aller et venir sur la berge, risquant parfois une patte sur la glace et rebroussant aussitôt chemin. J'ai vu la peur qui le saisit quand la glace se rompt en grondant et que le bruit se répand au fur et à mesure que la fissure s'allonge. Que de fois me suis-je efforcé d'entendre ça avec ses oreilles, de capter ces gémissements infinis. L'instinct de la bête doit lui dire qu'elle est alors entourée d'obscures menaces, et moi-même, écoutant ces bruits le soir, j'ai envie de m'en aller. J'aime pourtant cette solitude, spécialement au début de l'automne lorsque les lacs sont gagnés par une espèce de fièvre. Je la considère depuis longtemps comme féconde en occupations, aucun vide, pas de répit.
Cette glace venue trop tôt, ça veut dire un changement de temps. Du coup, le froid s'est intensifié, j'ai dû allumer le feu dès le matin et refaire un peu avant quatre heures un autre feu, c'est ainsi que pour l'instant j'expulse ma frilosité. Jusqu'à présent, je me suis contenté de la chaleur de la cuisinière.
Je me souviens des jours d'été à la même heure. J'arrêtais alors mon labeur quotidien et descendais au bord du lac à la rencontre du reste de la famille. Ainsi, après m'être consacré sans une pause à mes travaux, je les accueillais et nous nous mettions à table, nous allions voir aussi les nasses, puis arrivait le moment de faire chauffer le sauna.
À partir de neuf heures du soir, j'étais de nouveau seul devant mes papiers, à cette table, pendant que les autres allaient dormir dans la réserve, y compris Pépi. Le matin, nous le passions ensemble jusqu'à neuf heures. Combien je me sentais fort !
Je me rappelle ce jour du 16 mai où les glaces du dégel partaient à la dérive tandis que nous venions ici et qu'une infinité de glaçons raclaient le nez de la barque. Depuis, je n'ai pas quitté l'île, exception faite de deux ou trois voyages d'un jour en juin et d'un aller-retour à Helsinki en août.
Cinq mois et demi ont passé. D'abord j'avais pensé rester jusqu'à Noël, mais cette glace, mais ces craquements, ces bruits indéfinissables ... Non, je n'avais guère prévu qu'ils auraient cet effet sur moi.
Que dois-je faire ?
L'hiver vient de donner un nouveau tour d'écrou, je ne vais pourtant pas me laisser impressionner. Dans la journée, j'ai emmené Pépi à la maison et je suis revenu aussitôt. L'instant d'après, il a fallu refaire du feu dans la cheminée, encore que toute trace de chaleur ne se soit pas entièrement dissipée.
Je me trouve un peu trop de choses à faire dehors. J'entends la porte extérieure grogner lorsque je la pousse et en même temps je cherche le mot qui exprimerait le bruit qu'elle fait en été. Résonner ; jusquà ces derniers jours, lourde comme elle est, elle a plutôt résonné.
La glace vagit.
Je suis une fois de plus sous le porche cherchant quoi faire. Il faut vider la poubelle. On l'accroche à une branche d'arbre pour que Pépi n'en répande pas le contenu. je la décroche et me dirige vers le lac ; la table du jardin et la chaise sont restées devant la réserve. Je vide la poubelle à l'endroit habituel, c'est-à-dire dans un vieux bidon de peinture sans fond que j'écrase machinalement dans un trou avec d'autres ordures incombustibles. Avant de rentrer, je fais un tour sur la glace du lac, je ne puis dire quelle impression cela me fait. Je viens de passer ici mon dernier été et mon dernier automne — se peut-il que ... — Étrange pensée. Un lieu que je n'aurais jamais cru devoir abandonner, devoir quitter un jour. J'essaie de m'imaginer au loin et ce que je ferais en pareil cas. Suis-je arrivé au soir de ma vie, quand on renonce sans se révolter aux choses qui vous ont tenu à cœur la veille encore ?
Chez Lehtomäki, une longue rangée de lumière s'est allumée aux fenêtres de l'étable. La construction neuve des Pääskymäki se distingue mieux maintenant que le toit est tout blanc. Et toujours les bruits de glace.
Je remonte le sentier en passant devant un bouleau qui garde encore ses feuilles, je longe le sauna ; parvenu à la réserve, je décide de rentrer les meubles du jardin. Des feuilles s'y sont collées, je réussis à en nettoyer une partie et je les rentre. Je promène un regard là-dedans avant de refermer la porte comme pour emporter quelque dernière image aussi bien de l'endroit que des objets qui s'y trouvent. Je me retourne une fois la porte verrouillée et vois deux nouvelles lumières s'allumer.
Maintenant il devient impossible de donner un tour de clé à la cheminée. C'est à peine si on peut en toucher la gaine. J'allume la lampe. Commence la veillée.
Je me prélasse pendant une demi-heure au moins dans le lit. Il n'y a même pas Pépi pour me déranger. Mes pensées vagabondent. Aucune envie de me lever, de prendre un livre, je ne tiens pas à faire du café non plus, pour ne pas compromettre mon sommeil. Seul le tic-tac de la pendule remplit le silence. Je compte combien d'heures il reste jusqu'au matin et, bien qu'aimant ces sombres soirées et les occupations qu'elles vous apportent dans la tiédeur de la maison, en automne comme en hiver — au long de tant d'automnes, de tant d'hivers — je trouve cette nuit trop longue et trop vide.
Je comprends que ce printemps-ci, et tout cet été, et l'automne que j'ai attendu, espéré, oui, que tout ça, c'est fini, ça a fait son temps. Je me sens soudain de trop en ces lieux. Ils sont soudain de trop pour moi. je peux m'en aller tout de suite, sans attendre.
Ce que je fais d'ailleurs.
Je saute sur mes pieds. Je rassemble mes effets dans une sorte d'affairement recueilli. Je laisserai une maison chaude, me dis-je, les objets à la main. Je mets ceux-ci dehors et reviens pour éteindre la lampe, il a fallu la souffler par deux fois. Je suis environné maintenant d'une tiédeur noire — tout ce qui remue alors en moi et qui m'est devenu tellement familier, qui ne me visite aussi que pour me quitter, et n'attend pour s'évanouir que l'instant où cette porte se sera refermée sur moi et où je serai au froid piquant du gel !
Les objets toujours à la main, je considère à travers la nuit ce paysage si connu — et plus sur le côté, et plus loin, tous ces points de lumière. Au-delà, le ciel rougeoie, éclairé par les feux de la ville invisible comme à chaque fois qu'il fait assez sombre et que le temps est au beau.
Je marche le long du vieux cellier, descends vers le lac. En chemin, je m'arrête pour prêter l'oreille au travail des glaces. Je l'ai déjà presque oublié quand j'arrive au bord et, là, il se produit tout à coup un énorme ébranlement, une craquelure s'ouvre, interminable. J'écoute ; durant plusieurs secondes, la glace chante."

Traduit du finnois par Natalia Baschmakoff et adapté par Mohammed Dib